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“Fille DES” et féminité

15 juillet 2011

Conférence-débat avec le Dr Danielle Flaumenbaum, auteure de “Femme désirée, femme désirante”. 

S’approprier son corps… 

Le 20 novembre 2010, le Dr Danièle Flaumenbaum a animé une « conférence-débat » sur les thèmes de la féminité et du cheminement des couples qui n’ont pas eu d’enfant : comment se sentir femme lorsque, par exemple, l’on a été touchée par le DES…

Toutes les personnes présentes n’avaient pas nécessairement lu son ouvrage Femme désirée, femme désirante

Femme désirée, femme désirante
https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/femme-désirée-femme-désirante-9782228917568

Son approche ouvre des perspectives à chaque femme, et son discours est d’autant plus novateur pour nous, « femmes DES », que nous avons trop l’habitude d’entendre parler de notre corps en termes médicaux… 

L’intégralité de cette conférence est à consulter plus bas sur cette page. En voici quelques extraits. 

« Nous avons subi d’innombrables examens. Notre ventre est devenu transparent. Notre vagin a été regardé par des dizaines d’yeux, notre vulve ouverte par des dizaines de mains. (…) Nous avons envie de nous réapproprier le beau mot de pudeur. Nous avons envie de redevenir opaques. » 

Après avoir cité Marie Darrieussecq, Constance, Vice Présidente de l’association, poursuit : 

« J’ouvre le rideau maintenant que je l’ai fermé, pour traiter de choses dont on n’a pas l’habitude de parler… Lorsque j’ai vu que je n’arrivais pas être mère, j’ai cru que je ne pouvais pas être femme, et cela m’était insupportable : je ne voulais pas perdre sur tous les tableaux, je voulais trouver le moyen de restaurer quelque chose… J’ai eu un « parcours DES » : PMA, GEU, hospitalisations… Je n’ai pas eu d’enfant. Alors que je n’en pouvais plus, j’ai rencontré le Dr Flaumenbaum, il y a maintenant 14 ans de cela. Grâce à elle, j’ai vécu une expérience véritablement fondatrice : sentir que l’énergie pouvait partir de mes pieds puis monter dans mon ventre : j’ai nourri cela pour moi-même, pour restaurer l’image du corps. J’avais envie que ça respire, je voulais que cet espace-là vive, même si on m’a pris une trompe. C’est en partie grâce à cela que je suis devenue ce que je suis aujourd’hui.»

Dr Flaumenbaum : 

« Se réapproprier la pudeur et devenir opaque… Certes… Mais l’opacité ne doit exister que par rapport à un non-respect de la personne ou du corps. En revanche, on doit être transparente à soi-même, comme un miroir sans tain…

Ma connaissance du DES date de ma formation car j’ai fait ma spécialité de gynécologie à l’Institut Gustave Roussy à Villejuif. Je suis de la première génération de gynécologues à avoir prescrit la contraception. Et puis est arrivé ce qui s’est appelé la libération sexuelle.

Dans une naïveté tout à fait inconsciente, grâce à la contraception qui permet à notre corps de ne pas se prolonger, on a eu la certitude que cette sexualité allait être épanouie sans problème, puisqu’on était consentante et qu’on en avait le désir… Mais le temps aidant, on a constaté que le mode d’emploi pour une sexualité épanouissante n’était pas inscrit dans la boite de pilule…  et qu’il fallait qu’on se dépêtre de notre ignorance et de nos transmissions fausses concernant la sexualité. En fait, on ne savait pas qu’on ne savait pas y faire. Cette ignorance fait partie de nos blessures…

La sexualité était, pour moi, référée à la procréation, à la biologie : dans ma famille, être femme et mère c’était la même chose. J’ai dû apprendre que ce n’était pas le cas. 

J’ai découvert la médecine chinoise, la philosophie taoïste, sa notion de soins. En occident, on dit « qu’on a la vie devant soi ». En orient, on dit : «la vie nous habite » et il est effectivement important de se faire habiter par la vie… J’ai finalement compris que le corps de la femme est invaginé, qu’il est en creux, qu’il faut savoir être accueillante pour permettre l’emboîtement des sexes, et ainsi au souffle de la vie de circuler en nous. Ne pas avoir la connaissance de cet accueil et de cette réception est une grande blessure.

J’ai alors découvert la puissance de la régénération sexuelle, que le fait de se faire habiter par les souffles de la rencontre sexuelle permet de se défatiguer, de se renouveler, de se redresser, et même se ré-hausser, et que cela change notre positionnement dans la vie. 

Pour la médecine chinoise, nous sommes alimentés de notre naissance à notre mort, en permanence : 

  • par l’énergie du Ciel qui passe par nos mains et notre tête : une énergie invisible et impalpable traverse notre corps de haut en bas, l’informe et l’anime.
  • par l’énergie de la Terre  qui remonte et nous traverse de bas en haut en passant par nos pieds et notre sexe, qui fait que ce corps se remodèle en permanence. 

Quand on a une problématique, on reste focalisée sur elle et on la prend comme responsable de tous nos maux. Il est donc important d’avoir une perspective plus vaste pour pouvoir émerger de cette situation et s’en dégager. 

Le problème du DES met en évidence un héritage maternel qui a témoigné de difficulté de prolonger la vie, pour la donner. Peut-être plus que les autres femmes, vous avez à trouver des outils pour vous extirper de votre « glu DES » et apprendre à devenir qui vous êtes. 

Il s’agit d’un deuil : il faut commencer par accepter la perte de quelque-chose. Vous avez à réaliser que vous êtes héritière d’une situation et faire en sorte de pouvoir l’accepter, prendre du recul, en faire un tremplin pour vous retourner et aller de l’avant. La philosophie chinoise (Taoïste) considère qu’on arrive sur Terre par la porte d’une destinée ; on vient sur Terre pour se réaliser, pour accomplir un chemin. Le « 3ème désir » de Françoise Dolto implique, lui, qu’il y ait toujours le désir du foetus à s’incarner, en plus de la rencontre d’un spermatozoïde et d’un ovule : en deux mots, l’on aurait choisi notre famille d’incarnation. C’est une notion toujours délicate, surtout quand on a une problématique héritée… Cela ne renvoie pas seulement à des problèmes médicaux ou génétiques…

Cette notion – le fait d’intégrer qu’on a à créer sa vie – m’a beaucoup aidée dans ma vie personnelle comme dans ma capacité à soigner. Pour ma part, c’est réaliser que j’étais insatisfaite qui m’a fait comprendre que j’étais mal positionnée. Si l’on veut faire différemment il faut aviser, c’est-à-dire changer de positionnement. Ce n’est pas magique, ni immédiat, c’est un processus ; on doit comprendre et accepter qu’on a à apprendre.

La transmission de la sexualité référée au plaisir n’est pas encore intégrée socialement dans les mœurs. Il n’est pas encore transmis qu’une sexualité adulte s’ancre très tôt dans l’enfance. En cela, vous, les « femmes DES », n’êtes pas plus mal loties que d’autres, car cela n’existait tout simplement pas dans les familles. 

Être adulte, c’est utiliser les capacités humaines : faire l’amour, c’est être dans le partage énergétique des forces. Homme et femme, on sait qu’on est différent, mais on ne sait pas encore qu’on est complémentaire, que l’on a à profiter des forces de ce qu’on n’a pas quand on est dans l’échange charnel. 

Ceci est vrai pour les hommes comme pour les femmes : on est encore dans une croyance où la sexualité masculine irait de soi et qu’elle ne serait qu’une décharge de tension. Les Taoïstes m’ont appris que ce n’était comme cela que cela se passe. Le propre de la rencontre est qu’il y ait un emboîtement, autant pour l’homme qui se ressource dans le corps d’une femme, que pour la femme qui se régénère en accueillant les forces de son partenaire. Si le couple est dans l’ignorance de la réception, l’insatisfaction est présente, tous deux sont malheureux… La femme a peur et a mal, l’homme ne peut pas être à sa place. N’oublions pas que les difficultés sexuelles sont la cause de la majorité des ruptures…

Le soin comporte une recherche transgénérationnelle pour savoir comment nos ancêtres ont vécu leur vie d’homme, de femme, de père, de mère… et connaître l’histoire familiale : les accidents, les secrets, les morts et les dénis…

Pour procréer, vos mères ont eu besoin d’une assistance médicale, donc l’histoire familiale contient obligatoirement des événements que vous n’avez pas encore digérés…

Ensuite il y a le soin énergétique : la réparation de son schéma corporel passe par le remodelage de son image du corps. Or, en focalisant son attention sur une partie du corps, on amène automatiquement de l’énergie à cet endroit-là. Quand on ressent cet endroit-là, (et là, je fais référence particulièrement au sexe), le fait de le ressentir va amener des empreintes pour qu’il devienne le nôtre, celles qu’on aurait dû nous transmettre quand nous étions toutes petites, pour qu’il fasse partie de nous. Pour cela, il eût fallu que nous fussions pensées sexuées dès la petite enfance par nos parents. Bien sûr, pour cela il faut également apprendre son anatomie…mais l’intégration de son sexe passe par la sensation.

Il n’est pas question d’apprendre à faire l’amour, mais de faire en sorte que ce sexe nous appartienne, qu’il soit le nôtre et, à partir de ce moment-là, il saura fonctionner. 

Bien comprendre tout cela, c’est apprendre à se respecter, entretenir les forces de vie qui nous habitent. S’il n’y a pas de partenaire, on est seul entre soi et soi pour habiter son corps ; mais si l’on comprend que c’est le fait de se laisser traverser par ces énergies de vie qui nous remodèle en permanence et qui nous reconstitue, on se rend compte aussi que, même sans partenaire, on peut absolument faire cette pratique, pour être bien dans sa peau d’homme ou de femme. Quand on est seul, on accueille et on reçoit les énergies du Ciel et de la Terre. »

Quelques-unes des remarques faites dans l’assistance 

« Le souci, c’est que les personnes issues du DES ont plus ou moins des problèmes avec leur couple. » 

« Après mon accouchement, je ne m’y attendais pas du tout, j’étais très surprise, car j’avais l’impression que le bébé prenait tout son potentiel de caresses, que je n’étais plus qu’une maman, je n’étais plus une femme : ma vie était scindée en deux, j’avais du mal à redevenir femme ». 

« Quand on a la chance que l’enfant paraisse, après un parcours DES pénible, même si on a envie de reconstruire sa vie de couple, c’est difficile, car elle a été mise à mal par le périple accompli pour devenir parent. »

Les réponses figurent dans le compte-rendu complet de cette rencontre : Conférence du Dr-Flaumennbaum questions-réponses

L’ouvrage du Dr Flaumenbaum est  disponible chez Payot, en grand format, en format de poche, ainsi qu’en version numérique :https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/femme-désirée-femme-désirante-9782228900751